06 mai 2007

Pour finir en beauté


La Semaine sainte...


J'écoute du didgeridoo en buvant du manzanilla. Cette phrase, qui aurait pu être un SMS envoyé à un ami, je trouve amusant de commencer par elle un petit texte sur l'élection présidentielle, histoire d'oublier provisoirement des mots qui auraient fait la joie de Flaubert dans son Dictionnaire des idées reçues, comme " fiscalité confiscatoire " (" fait fuir les talents ") ou " revalorisation du travail " (" permet de travailler plus pour gagner plus "). Et j'aggrave mon cas en relisant La Bruyère : " Un esprit sain puise à la cour le goût de la solitude et de la retraite. " La télévision aurait-elle remplacé la cour du XVIIe siècle ? On ne peut pas dire ça. Les chaînes (quel mot !) nous renseignent et parfois nous éclairent, chacun le sait. Pour les deux tours des élections, elles se calquent sur la Semaine sainte, où le Christ meurt le Vendredi saint, ensuite il ne se passe plus rien le samedi et on attend le dimanche de Pâques pour la résurrection. Idem à la télé : vendredi c'est fini, le samedi silence complet, et le résultat tant attendu arrive le dimanche soir. Je n'ai jamais compris pourquoi le samedi est un jour de silence obligatoire, sauf mon explication qui vaut ce qu'elle vaut de copie inconsciente de la Semaine sainte - le débat entre les deux candidats du deuxième tour faisant office de dernière Cène (cette année, nous avons même eu droit à un certain M. Besson qui a tant bien que mal interprété le rôle de Judas, un rôle mieux joué naguère par celui qu'il rallie et qui l'accueille en expert - sans en penser moins, souhaitons-le lui).
Je reviens au didgeridoo (un instrument de musique des aborigènes d'Australie) et au manzanilla (un vin espagnol très sec, " muy fino "). J'aurais aussi bien pu écrire : " J'écoute du koto en buvant du saké. " Ce sont des phrases de romancier. Ce ne sont pas des phrases à prononcer dans un débat. Imaginez ça deux secondes ! A tout prendre, j'aurais préféré trouver ce genre de phrase dans la bouche d'un séide de l'UMP plutôt que de l'entendre dire, en guise sans doute d'argument, que Mme Royal " est nulle " (on ne parle pas de la sorte, M. Pierre Lellouche, d'une candidate à la présidence de la République). C'était ce qu'il trouvait à répondre à M. Moscovici venant de qualifier M. Sarkozy de " bushiste ". Très instructive, cette émission. Mots croisés, Yves Calvi sur la 2. Nous avions trois rencontres, sur des thèmes différents, entre des partisans ou sbires des deux candidats, et on retombait dans l'ornière. Alors qu'on nous annonce rupture et renouveau, c'était le naturel revenu au galop : insultes, mensonges, mauvaise foi. Une de mes bêtes noires sera dorénavant Mme Rachida Dati. Elle ne pourrait pas se montrer un peu plus agréable ? Ce serait dans son intérêt. J'admets que le rôle de la voix de son maître ne doit pas être épanouissant.
Nous venons de passer des semaines formidables. Le soir du premier tour, on demande à un journaliste télé qui se trouve au siège du PC : " Quelle est l'ambiance ? " La réponse me parut inoubliable : " En termes d'ambiance, disons qu'il n'y en a pas beaucoup. " Le même soir, 20 heures approche, ce fut annoncé comme un " moment fatidique "... Mme Marine Le Pen, qui s'y connaît en Le Pen, surnomme M. Sarkozy un " Le Pen light ". Le plein emploi dans cinq ans est promis à gauche et à droite. C'est sans doute que ledit plein emploi arrivera quoi qu'il arrive, s'il arrive. Et si chacun relisait le vieux Voltaire : Candide ou l'Optimisme ? On devrait élire le président de la République plus souvent. A en croire l'Audimat, c'est devenu aussi passionnant que le foot, mais pourquoi M. Sarkozy a-t-il cru bon de faire cette comparaison avec une finale de Coupe du monde ? Il aurait pu trouver mieux pour minimiser le danger Bayrou. Avec tous les grands mots très nobles dont il se montre prodigue, on ne s'attendait pas à cet amalgame entre la politique et le sport... Il n'est pas à ça près. Sur un site Internet que j'ai trouvé en consultant celui de LCI, on peut l'entendre dans un document non daté, c'est un gros plan un peu flou : " Eh bien, je vais aller jusqu'au bout. Que cela plaise ou que cela déplaise, il ne faut pas douter de ma capacité à avoir une énergie indomptable (il appuie sur le mot indomptable). C'est le message. J'espère que chacun l'aura compris. " Il y a là quelque chose de menaçant, ou je me trompe ?
J'aurais dû tenir un journal, au moins pour mes petits-enfants, lesquels n'en auront pas besoin puisqu'ils ont suivi la campagne comme des grands, à 7 et 9 ans. A quand le droit de vote des jeunes ? Il y a bien le Goncourt des lycéens. Si on estime pouvoir les condamner à 16 ans, ils pourraient aussi voter à cet âge-là. Ils sont tout à fait aptes à comprendre les insanités de Mme Alliot-Marie qui reproche à Mme Royal de " changer d'idées comme de jupe " (pourquoi pas comme de strings, tant qu'elle y est ?)
Dans cette campagne, l'absence de ce qu'on appelle la culture n'est pas convenable, pas pardonnable. On a l'impression d'avoir affaire pour la première fois dans ce pays à des candidats qui ne savent pas vraiment ce que c'est, à moins que ça ne les effarouche, mais dans la France dont ils nous parlent, la culture est essentielle. Louis XIV le savait, Charles de Gaulle aussi, et tous les présidents jusqu'à aujourd'hui. Cinéma, théâtre, peinture, musique, poésie, c'est passé où ? Et là (je fais une ellipse) on tombe sur la question des besoins et des désirs. On réduit le citoyen à ses besoins. Le désir, c'est plus périlleux, ça pourrait ne rien avoir à faire avec le Trésor public ou le Gaz de France. D'où le côté pathétique des candidats qui veulent que ce soient eux qu'on désire, alors qu'on aurait juste besoin de leurs services. Et comme ils ne sont pas sûrs qu'on les désire, ils nous demandent de nous aimer les uns les autres, ils nous parlent de respect, c'est du catéchisme, c'est consternant.
Cela dit, on pourra toujours discuter avec la prochaine personne qui sera à l'Elysée. On ne pourra pas discuter avec M. Sarkozy : il semble perdu à tout jamais dans un rêve où il traite, voire malmène, ses chers compatriotes comme un enfant ses jouets. Il veut nous protéger : on ne le lui a pas demandé. Mme Ségolène Royal (Marie-Ségolène, c'était joli aussi, comme prénom) est de mieux en mieux : on l'a vue évoluer au cours des mois. La misogynie, qu'on croyait endormie, s'est réveillée et acharnée sur elle. On lui reprocha le néologisme " bravitude " qui sera un jour dans Le Petit Robert, j'en fais le pari. Elle cultivera bien notre jardin (c'est Voltaire que je fais parler !) Pourvu que ce soit elle qui nous dise ses voeux à la télévision à la fin de cette année.

François Weyergans
© Le Monde

23 avril 2007

Pax Presidentia





Je n'ai pris qu'un bulletin, Ségolène, c'était le tien,
Ne te méprends pas, vilaine, je te retiens,
Drapeaux et cocardes, coquine, tu avaleras,
Jusqu'à la lie, libertine, me le paieras.

Besancenot ton frère montre la voie,
L'Internationale est à faire, nouvelle foi
En l'avenir fait femme, je te suivrai
Révolution et flamme t'apporterai.

Ce soir, blanche, tu as parlé,
Sans fard, franche, tu as sublimé
Le désir de la France en lui criant "Venez !"

Nous croyons en toi, Ségolène, nous te suivons,
Comme à l'eau, Marjolaine, nus nous allions
De la claire fontaine nous nous abreuverons.

14 mars 2007

Truismes


Autant que les hommes, la candidate socialiste «en a». Son incompétence supposée comporte des relents de misogynie.

Pourquoi je vote Ségolène Royal
Par Marie DARRIEUSSECQ
lundi 5 mars 2007
Marie Darrieussecq écrivain. Dernier ouvrage paru : Zoo, P.O.L., 2006.

Parce que c'est une femme...Il faut voter pour Ségolène Royal parce que c'est une femme. C'est à peu près tout ce que j'ai à dire. C'est l'honneur du PS d'être le premier grand parti à proposer, en France, une candidate femme à l'élection présidentielle. Que cela ne se soit pas produit plus tôt est une honte pour ce pays.
Je laisse de côté Arlette Laguiller qui, vue de l'étranger, est un phénomène folklorique. Il suffit de l'écouter parler, d'ailleurs, ou de se rappeler Thatcher dans un autre genre, pour être persuadé(e) qu'un monde dirigé par les femmes ne serait pas plus juste ni moins violent.
Ségolène Royal semble partager avec tous les autres candidats (et au moins autant que Nicolas Sarkozy) l'idée fixe du pouvoir, le délire de grandeur solitaire, l'énergie maniaque, cette «gnaque» qui peut laisser perplexe ou admiratif. En bref, «elle l'a», la mégalomanie indispensable pour prétendre être élu (e) président (e) de la Ve République. La force de Ségolène Royal n'est ni féminine ni masculine : elle est personnelle. Elle en veut, elle en a. On mettra ce qu'on veut derrière le «en», la libido qui la porte n'a rien à voir avec les organes de la différenciation sexuelle.
Certes, je ne serais pas prête à voter pour une femme de droite. Et le fait que je veuille voter Ségolène parce qu'elle est socialiste, parce qu'elle représente une gauche qui, sans m'enthousiasmer, me paraît une option meilleure que les autres, cette opinion ne regarde que moi. Mais elle est «femme». Notre «première présidentiable femme». Enthousiaste ou pas, je veux que mes enfants, que les petits Français en général, n'aient pas les mêmes souvenirs que ma génération et toutes les générations antérieures. Cette élection peut être un moment historique ; ou du moins un moment où la France sortira de son ridicule historique.
J'ai grandi en ne voyant que des hommes à la télévision. Le Président était «le» Président, et ses ministres étaient des hommes, comme sous Louis XIV. Je ne pouvais pas rêver au pouvoir, puisque le pouvoir était masculin. Or s'il prend à ma fille le délire ­ ou l'ambition légitime ­ de se rêver en présidente, je veux que cela lui soit possible autant qu'à mon fils, dans un monde possible pour tous les deux. Et si mon fils se retrouve un jour gouverné par une femme, je veux que cela lui semble possible aussi, sans qu'il le vive comme une anomalie ou une humiliation.
«Voter Ségolène»... L'expression même est curieuse. L'appelle-t-on par son prénom parce que c'est une femme ? Un petit nom, pour une femme qu'on minorise, qu'on veut puériliser dans sa puissance ? On ne dit pas «voter Nicolas», encore moins «voter François» ­ et ceux qui disent «voter Jean-Marie», je me passe volontiers de leur compagnie. Mais il faut admettre que «Royal» est, en France, un nom plus répandu que le long «Ségolène», dont les syllabes chics, y compris dans la presse étrangère, la caractérisent d'emblée. Un personnage est né(e).
Mais on dit surtout «Ségolène» parce que son nom, Royal, pose problème. «Voter Royal» sonne comme un paradoxe en démocratie. Or la Ve République est par bien des aspects un régime monarchique. S'appeler «Royal» dans cette élection est un atout qui fonctionnera peut-être dans l'inconscient national. Cette bourgeoise a quelque chose d'une reine.
Qu'on la taxe systématiquement d'incompétence est nettement plus misogyne. On reproche beaucoup de choses aux autres candidats, mais jamais l'incompétence... Avec le parcours qu'a cette femme, comment peut-on penser une seule seconde qu'elle est incompétente en politique ?
Quant à la compétence pour présider un pays, personne ne l'a. Y croire est un délire collectif très ancien, porté et relayé par les institutions, en particulier en France. Il se trouve que le délire a jusqu'ici été incarné par des hommes. Nous avons eu Jeanne d'Arc, une marginale ; jamais d'Elizabeth ni de Christine de Suède. En France, c'est duas habet , comme pour les papes. Et si on essayait, pas forcément d'être royalistes, mais d'être un peu moins ridicules ?

Qui l'eût cru ?



Encore la politique à la Corentin...

11 mars 2007

Stance à Laurence


Non, non, non, non, ma Ségolène n'a traité personne de "bouse", elle a dit "en campagne, c'est à la fin de la foire qu'on compte les bouses", il y avait au moins trois degrés dans le clin d'oeil qui faisait référence à 2002...Dis-donc, Lolo, mais où ils sont les intellos ? Johnny, Doc Gynéco, Bernard-Henry Deuxballes, Finkelcroute, Max le Gallo, etc... ils sont avec le petit Nicolas. Je crois bien être le seul intello du côté de Ségolène, et j'entends bien le rester... Je suis en train de penser à ouvrir une permanence de désir d'avenir à Malmousque, le moment est mal choisi, le Service des Eaux refait les canalisations, déjà qu'il n'y avait pas beaucoup de place pour stationner, cette fois c'est foutu il va falloir aller se garer sur la Corniche, alors tu vois le bide d'ici ? il faut que je songe à flécher ma permanence depuis le Vallon des Auffes, j'espère qu'ils ne confondront pas avec le bureau de recrutement de la Légion Etrangère, remarque, ma Ségolène cela ne lui déplairait pas. Ce que je souhaite au fond, mais j'ose à peine y penser, c'est que, je ne sais pas, peut-être entre les deux tours, elle me fasse l'honneur de sa visite, on ferait une photo, puis je l'amènerais au cabanon embrasser maman-qui-vote-bèèrou, tiens juste pour lui faire honte, "Maman, devine qui vient dîner ?" "Ségolène ? tu n'y penses pas, je n'ai que du Picard !! Si on allait manger une pizza chez Jeannot ?" "Chez Jeannot ? Ségolène ? Non mais, si tu ne nous fais pas la choucroute de poissons, j'l'amène au Petit Nice, tu peux venir si tu as le temps, il y aura Jack Lang..." Aïe, aïe, je rêve, je m'emballe, je m'y crois, c'est terrible la campagne, tout ça va retomber comme un soufflé, elle ne s'arrêtera pas, elle ne verra pas la pancarte, qui aura été emportée par un coup de mistral, avec la chance que j'ai, tiens oui, avec la chance que j'ai, s'il y a un coup de vent, c'est le bé-harnais qui va rappliquer, grand-largue toutes oreilles dehors, il risque de s'échouer au pied du Grand-Balcon, tomber sur la patronne du Sunlight "je cherche le Centre, je cherche le Centre..." oui, mais quel Centre ? rien qu'à Malmousque il y en a quatre, des Centres (si on compte le CNRS et les goélands de Malmousque), heureusement qu'on a gardé des Cercles, pour nager, et des Ententes, pour le deuxième tour...

02 mars 2007

BéHarnais


Bayrou, c'est terrible l'enfance qu'il a eue ! J'ai regardé par hasard "envoyé spécial" hier soir... j'ai pleuré, heureusement j'étais seul face à mon poste. L'héroïsme du petit François face à son bégaiement, alors que l'éloquence chantait dans sa tête, aïe je l'évoque et je me remets à sangloter. Et IL S'EN EST SORTI !! C'est vrai, il est devenu très éloquent, son discours est toujours inattendu, pittoresque, voire humoristique, c'est vrai cela chante, c'est un peu comme une chanson "hon". C'est le pâtre sur le rocher, l'écho résonne au fond des vallées. Il est indéniable qu'il y a de plus en plus d'écho, peut-être ses oreilles ? J'aime aussi quand il rit, ça fait du bien aux chevaux, il leur parle aussi, j'ai déjà vu ça quelque part. Les chevaux, ils n'aiment pas Sarko qui hennit, ni Ségolène qui annone, Lepeine qui barrit, et Arlette qui postillonne. Mais ils aiment François B. qui leur susurre à l'oreille, c'est de cette manière qu'il a arrêté de bégayer.


Oui, mais cet écho, d'où il vient ? Le pavillon de l'oreille est la partie visible de l'oreille. Vous avez certainement remarqué sa forme étrange. Eh bien celle-ci a une fonction. En effet, il modifie légèrement le son suivant son angle d'incidence, avant de parvenir au tympan, permettant au cerveau de distinguer plus précisément l'origine de la source sonore. C'est grâce au pavillon que nous arrivons (assez mal) à distinguer l'origine d'un son dans le plan vertical. Donc, François B., il distingue mieux que les autres les sons du haut des sons du bas, mais cela me rappelle encore quelqu'un, décidément ce déjà vu ne me lâche pas. Cela permet au cerveau... oui mais.., oh si, ce n'est pas parce que les sons d'en bas résonnent si fort lorsqu'ils se trouvent concentrés au niveau de ses organes pavillonnaires pour s'engouffrer dans ses conduits auditifs externes (qu'il cotonnetige chaque matin avec une balayette) se frapper contre ses tympans de bé-harnais, avant d'entrainer tout ce que l'on sait au niveau des cellules ciliées externes qui poussent jusqu'à lui démancher la lame basilaire, qui va écrabouiller les derniers cils des cellules ciliées internes les forçant à cracher des salves de potentiels d'action comme un soufflet de forge, tout ce pataquès nous mène où, oui où ? sinon au corps genouillé médian, puis au cortex du gyrus de Heschl, c'est bien dans le cerveau le gyrus de Heschl, non ?? Alors, n'allez pas dire que si ça résonne si fort, qu'il y a de l'écho, c'est parce que... n'allez pas dire ce que je n'ai pas dit. Je n'ai fait aucun rapprochement avec les chansons "hon", c'était juste l'interview.

C'est pas grave, puisqu'il l'avait dans la tête l'éloquence : c'est elle qui fait tout ce bruit quand il l'incline.